Mes notes de lectures du livre Écologie et politique de André Gorz.
Dans une société ou tout le monde serait pauvre, personne ne le serait. Dès que la masse accède à un type de produit, celui-ci est dévalorisé. L’innovation nourrit l’illusion que ce qui est nouveau est mieux (Illich, la convivialité)
« Un monopole radical s’établit quand les gens abandonnent leur capacité innée de faire ce qu’ils peuvent pour eux-mêmes et pour les autres, en échange de quelque chose de « mieux » que peut seulement produire pour eux un outil dominant. Cette domination de l’outil instaure la consommation obligatoire » (Illich)
La science et la technologie, loin d’exiger le gigantisme, ont accouché d’outils géants parce que le capital demande ces outils-là et refuse les autres. Les moulins à vent, par exemple, comme l’a montré le grand historien marc Bloch, ont été éliminés pour la seule raison que, le vent étant partout et à tout leur monde, ils ne permettent pas la monopolisation.
Le seul moyen de vivre mieux, c’est de produire moins, de consommer moins, de travailler moins, de vivre autrement.
L’idéologie sociale de la bagnole
La bagnole a rendu la grande ville inhabitable. Elle l’a rendue puante, bruyante, asphyxiante, poussiéreuse, engorgée au point que les gens n’ont plus envie de sortir le soir. Alors puisque les bagnoles ont tué la ville, il faut davantage de bagnoles encore plus rapides pour fuir sur des autoroutes vers des banlieues encore plus lointaines. Impeccable circularité : donnez-nous plus de bagnoles pour fuir les ravages que causent les bagnoles.
Aucun moyen de transport rapide et d’évasion ne compensera jamais le malheur d’habiter une ville inhabitable, de n’y être chez soi nulle part, d’y passer seulement pour travailler ou, au contraire, pour s’isoler et dormir.
Douze milliards d’hommes
Avec 13% seulement de la population mondiale, les pays capitalistes industrialisés consomment 87% des ressources énergétiques. Ils s’approprient la moitié de la pèche mondiale, n‘en laissant au tiers-monde que le cinquième. Ils utilisent, pour se nourrir, 20% des surfaces agricoles du globale en plus des leurs propres. Ils établissent actuellement au Sahel, en pleine famine, un élevage de 150 000 hectares qui doit fournir de la viande à l‘Europe. […] Ils utilisent 800 à 900 kilos de céréales par an et par tête pour engraisser cheptel et volailles, alors que 150 à 200 kilos suffisent à un habitant du tiers-monde pour se nourrir, lui-même et ses poules.
Tant que le premier monde subventionnera et armera des régimes qui affament les peuples et « exportent leurs produits coloniaux », ses craintes démographiques resteront suspectes dans le tiers-monde. Elles sont pourtant fondées.
Médecine, santé et société
Il y a de plus en plus de médecins et de plus en plus de malades. Les maladies épidémiques les plus répandues sont des maladies dégénératives, de civilisation. Tout indique qu’elles sont liées à notre mode et notre milieu de vie.
La médecine devient une « technique » pour faire accepter l’inacceptable : les raisons de la maladie sont des raisons sociales, économiques, politiques.
Iatrogénie structurelle (Illich) : engendrement structurel de la maladie par l’institution médicale
La santé et le problème de la santé doivent être démédicalisés : l’une et l’autre ne sont pas du ressort du médecin et de la médecine, mais de l’hygiène. Il y a entre l’hygiène et la médecine la même différence qu’entre la culture populaire et la culture savante.
Depuis une dizaine d’année, la médecine rend malade plus de gens qu’elle n’en guérit. […] Prétendant rafistoler cas par cas, individu par individu, des populations de plus en plus maladives, elle masque les causes profondes de leur maladie, qui sont sociales, économiques et culturelles. Prétendant soulager souffrance et angoisse, elle oublie que, en dernière analyse, les individus sont ravagés dans leur corps et leur psychisme par leur mode de vie. La médecine, en les aidant à supporter ce qui les détruit, contribue finalement à cette destruction.